Le 23 décembre 1865, quatre pays européens tentent une expérience audacieuse : unifier leurs monnaies pour faciliter les échanges et stabiliser l’économie. En fondant l’Union monétaire latine, la France, l’Italie, la Suisse et la Belgique posent les jalons d’une coopération monétaire inédite, annonciatrice des débats contemporains sur l’intégration économique européenne.
Le 23 décembre 1865, la France, l’Italie, la Suisse et la Belgique signent à Paris un accord inédit : la création de l’Union monétaire latine (UML). À l’heure où l’Europe est morcelée par une multitude de monnaies nationales, cette convention marque l’une des premières tentatives de coopération monétaire internationale sur le continent.
Exemple de pièces émises par l"Union Latine"
(taille et poids identique au 20 francs Napoléon dont elles se sont inspirées)
L’objectif est avant tout pratique. Les échanges commerciaux se développent rapidement, mais la diversité des systèmes monétaires complique les paiements et favorise les incertitudes. Les États signataires décident donc d’harmoniser leurs monnaies en adoptant des pièces de même poids et de même titre, fondées sur un système bimétallique or-argent. Le franc français sert de référence : les monnaies nationales conservent leur nom, mais deviennent interchangeables dans l’ensemble de l’Union.
Cette uniformisation facilite la circulation des capitaux et des marchandises. Une pièce frappée en Belgique ou en Italie peut ainsi être utilisée sans conversion en France ou en Suisse. L’Union monétaire latine apparaît alors comme un outil de modernisation économique et un symbole d’intégration, bien avant l’euro du XXIᵉ siècle.
Cependant, l’UML révèle aussi les fragilités d’une union monétaire sans véritable autorité centrale. Les déséquilibres entre l’or et l’argent, les émissions excessives de monnaie par certains États et les crises financières de la fin du XIXᵉ siècle affaiblissent progressivement le système. Si l’Union subsiste officiellement jusqu’en 1927, elle cesse de fonctionner efficacement dès la Première Guerre mondiale.
Malgré son échec relatif, la fondation de l’Union monétaire latine, le 23 décembre 1865, demeure une étape majeure dans l’histoire européenne. Elle témoigne d’une ambition ancienne : dépasser les frontières nationales pour organiser l’économie à une échelle supranationale, une idée qui trouvera, un siècle plus tard, un nouvel écho avec la construction européenne.
La confiance publique est l’âme de la monnaie.
Mirabeau (1790)
La monnaie en violence et confiance
Pour Aglietta et Orléan, la monnaie n’est pas qu’un outil économique : elle fonde la confiance et le lien social. À travers l’euro ou la crise argentine, ils montrent qu’elle peut apaiser ou déclencher la violence collective. La monnaie est ainsi un « fait social total », au cœur des sociétés humaines.