Parcoursup : la République au pied du mur

L’histoire française aime les promesses solennelles. Parmi elles, l’école occupe une place sacrée : creuset de l’égalité, ascenseur social, matrice de la citoyenneté. Depuis la Révolution, la République se raconte comme un régime où le mérite triomphe des origines. Mais l’histoire, précisément, nous apprend que cette promesse n’a jamais été tenue sans réserve.

La sélection n’est pas une invention contemporaine. Elle traverse tout le XIXᵉ et le XXᵉ siècle, dissimulée derrière les concours, les filières, les établissements d’élite. La nouveauté n’est pas qu’elle existe, mais qu’elle s’affiche. Avec les dispositifs contemporains d’orientation, la République ne masque plus le tri : elle l’organise, le rationalise, l’administre.

C’est là que le malaise surgit. Car en assumant la sélection, la France met à nu une contradiction ancienne : proclamer l’égalité tout en entérinant des inégalités profondes. Les critères sont dits objectifs, les procédures se veulent neutres, mais l’historien sait que jamais le mérite n’a été socialement pur. Derrière les dossiers, il y a des territoires, des héritages, des capitaux culturels inégalement distribués.

L’enjeu n’est donc pas technique, il est politique et historique. Chaque époque révèle ce qu’elle accepte de tolérer. La nôtre semble consentir à une République plus lucide, mais aussi plus dure : une République qui sélectionne ouvertement, au risque de transformer l’égalité en simple principe rhétorique.

L’histoire ne tranche pas à notre place. Elle rappelle seulement ceci : lorsqu’un idéal cesse d’être interrogé, il devient un alibi. À nous de décider si la sélection doit être corrigée, compensée, ou repensée. Car une République qui renonce à croire en l’égalité réelle finit toujours par se contenter de la gérer.