La France et les Français : de la terre aux citoyens

Publié le 29 décembre 2025 à 07:57

De la préhistoire aux débats contemporains, l’histoire de la France ne se réduit ni à une suite de rois ni à un roman national figé. Elle est celle d’un territoire longtemps traversé par les migrations, d’un État lentement construit, et surtout de femmes et d’hommes ordinaires, paysans, artisans, ouvriers ou citoyens, qui ont façonné le pays autant qu’ils l’ont subi. Entre continuités profondes et ruptures décisives, ce grand récit retrace comment la France et les Français se sont inventés au fil des siècles.


La Liberté guidant le peuple.d'Eugène Delacroix, Musée du Louvre

Aux origines : des terres habitées avant la France

La France n’est pas née d’un coup. Avant d’être un État, encore moins une nation, elle fut d’abord un territoire habité, modelé par les climats, les fleuves et les migrations humaines. Dès la préhistoire, les vallées de la Seine, de la Loire, de la Garonne ou du Rhône attirent des groupes humains. Lascaux, Chauvet ou Cosquer rappellent que ces terres furent très tôt des lieux de culture, de symboles et de récits.

À l’époque néolithique, l’agriculture transforme profondément les sociétés. Les premiers paysans venus du Proche-Orient s’installent, défrichent, bâtissent des villages. La France future se structure autour de terroirs, de pratiques locales, de paysages humanisés. Cette diversité initiale ne disparaîtra jamais complètement.

Avec l’âge des métaux puis l’Antiquité, ces terres deviennent un carrefour européen. Les Celtes – que les Romains nommeront Gaulois – n’y forment pas un peuple unique, mais une mosaïque de tribus, de langues, de coutumes. Déjà, l’unité est une construction plus qu’un fait.

Vercingétorix jette ses armes aux pieds de César (tableau de Lionel Royer, 1899).

La Gaule romaine : naissance d’un socle commun

La conquête romaine au Ier siècle avant notre ère constitue une rupture majeure. En intégrant la Gaule à l’Empire, Rome impose des institutions, un droit, des villes, des routes, une langue administrative. Mais elle ne détruit pas tout : elle compose, absorbe, transforme.

La Gaule romaine devient l’un des territoires les plus prospères de l’Empire. Les élites gauloises adoptent le latin, le mode de vie romain, tout en conservant parfois leurs traditions. C’est dans cette période que se forgent des éléments durables : le réseau urbain, le tracé des routes, une première culture politique partagée.

Le christianisme, d’abord marginal et persécuté, s’implante progressivement. À la chute de l’Empire d’Occident, au Ve siècle, la Gaule n’est pas un désert politique : elle est un espace déjà structuré, prêt à être recomposé.

Le Moyen Âge : de la France des rois à celle des peuples

Les royaumes francs, puis la dynastie capétienne, posent les bases d’une continuité politique. Mais pendant longtemps, le « roi de France » ne règne que sur une partie du territoire. La France médiévale est fragmentée, féodale, profondément locale.

Pourtant, c’est au Moyen Âge que se construit lentement l’idée de France. La langue française émerge à côté du latin, les coutumes s’écrivent, le pouvoir royal s’affirme. Les guerres, notamment la guerre de Cent Ans, jouent un rôle paradoxal : elles détruisent, mais elles contribuent aussi à faire naître un sentiment d’appartenance face à l’ennemi.

Jeanne d’Arc incarne cette mutation symbolique : une figure populaire, religieuse et politique, mobilisée au nom d’un royaume qui commence à se penser comme communauté.

Les Français du Moyen Âge ne sont pas encore des citoyens, mais ils vivent déjà dans un espace de références communes, de plus en plus unifié par le droit, la fiscalité et la monarchie.

La monarchie moderne : grandeur de l’État, contraintes des peuples

Du XVIe au XVIIIe siècle, la France devient l’un des États les plus puissants d’Europe. La monarchie se centralise, l’administration s’étend, l’armée se professionnalise. Avec François Ier, puis surtout Louis XIV, l’État affirme sa souveraineté et sa majesté.

Mais cette puissance a un coût. Les guerres, les impôts, les inégalités sociales pèsent sur les populations. La société reste profondément hiérarchisée. Les paysans forment la majorité des Français ; leur vie est rythmée par le travail de la terre, les crises frumentaires, les contraintes seigneuriales.

Dans le même temps, les villes se développent, une bourgeoisie lettrée émerge, les idées circulent. Les Lumières ne sont pas seulement un mouvement intellectuel : elles expriment une tension croissante entre un État fort et une société qui aspire à plus de justice et de participation.

1789 : la Révolution, fracture et fondation

La Révolution française est à la fois une rupture radicale et un héritage. Elle met fin à la monarchie absolue, abolit les privilèges, proclame l’égalité juridique et la souveraineté de la nation. Pour la première fois, les Français deviennent officiellement des citoyens.

Mais cette transformation est violente, conflictuelle, instable. La Révolution divise, fait peur, suscite des résistances. La Terreur, les guerres, les retournements politiques montrent combien il est difficile de faire naître un ordre nouveau.

Napoléon Bonaparte stabilise certains acquis tout en rétablissant un pouvoir autoritaire. Le Code civil, l’administration préfectorale, l’école des élites marquent durablement la France. L’État moderne est désormais solidement en place.

XIXe siècle : une nation en apprentissage

Le XIXe siècle est celui de l’apprentissage de la démocratie. Monarchies, empires, républiques se succèdent. La France hésite, tâtonne, recule parfois. Mais lentement, la République s’impose.

C’est aussi le siècle de la transformation sociale. L’industrialisation modifie les paysages, les rythmes de vie, les rapports sociaux. Une classe ouvrière apparaît, revendique, lutte. Les campagnes se vident partiellement, les villes grossissent.

L’école républicaine joue un rôle fondamental. Elle diffuse la langue française, les valeurs civiques, une mémoire nationale. Elle fabrique des Français conscients d’appartenir à une même histoire, parfois au prix de l’effacement des cultures locales.

XXe siècle : épreuves, fractures et refondations

Les deux guerres mondiales marquent profondément la France. La Première Guerre mondiale saigne le pays, la Seconde le traumatise durablement par la défaite, l’Occupation et la collaboration. La Résistance devient un mythe fondateur, mais aussi un enjeu mémoriel complexe.

Après 1945, la France se reconstruit, se modernise, invente l’État-providence. Les Trente Glorieuses transforment la société : urbanisation, consommation de masse, mobilité sociale. Mais les fractures demeurent.

La décolonisation oblige la France à repenser son rôle dans le monde et son rapport à elle-même. Les migrations postcoloniales modifient la composition de la société française, suscitant débats, tensions, mais aussi renouvellements culturels profonds.

Churchill et le général De Gaulle descendent les Champs-Élysées en 1944

La France contemporaine : une histoire toujours en mouvement

Depuis la fin du XXe siècle, la France fait face à de nouveaux défis : mondialisation, crise sociale, remise en cause de l’État-providence, urgence écologique. Le modèle républicain, fondé sur l’universalité et l’égalité, est interrogé par les inégalités persistantes et la diversité croissante des trajectoires.

Les Français d’aujourd’hui héritent d’une histoire longue, complexe, parfois contradictoire. La France n’est ni un bloc immobile ni une simple invention récente : elle est le produit de siècles de conflits, d’intégrations, de renégociations permanentes entre le pouvoir et la société.

L’histoire de la France et des Français n’est pas celle d’un destin écrit à l’avance. Elle est celle d’un équilibre instable entre unité et diversité, autorité et contestation, héritage et invention.

Comprendre cette histoire, ce n’est pas chercher une essence figée, mais accepter l’idée que la France est une construction collective, sans cesse recommencée. Une œuvre inachevée, façonnée par ceux qui l’habitent, la contestent, la transforment — hier comme aujourd’hui.


La France est moins une race qu’une histoire.

Marc Bloch


 

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