Pour une France souveraine et stratégique au cœur de l’Europe
Il est temps pour la France de retrouver une voix forte, claire et indépendante sur la scène européenne. Une voix qui ne soit ni le simple écho des intérêts américains, ni la caisse de résonance des priorités économiques allemandes. Depuis trop longtemps, notre pays semble naviguer à vue, tiraillé entre des fidélités transatlantiques désuètes et une soumission tacite à la domination industrielle et commerciale de Berlin. Or, une nation comme la nôtre ne peut se contenter d’un rôle subalterne dans le concert des puissances. L’histoire, la géographie, la culture et les ressources humaines de la France l’y destinent : elle doit redevenir une nation qui propose, qui construit, qui entraîne.
Mais pour être écoutée, encore faut-il être crédible. Et la crédibilité commence par l’exemplarité. Dans un monde en mutation rapide, il est urgent que la France assainisse ses finances publiques, non pour satisfaire les injonctions comptables de Bruxelles, mais pour restaurer sa capacité d’action et de projection. Les réformes de structure ne peuvent plus être différées : il en va de la soutenabilité de notre modèle social, de la résilience de nos institutions, et de la confiance des citoyens dans la parole publique.
Au-delà de l’urgence, c’est une vision de long terme qu’il nous faut retrouver. Une vision qui rappelle celle du plan mis en œuvre à la Libération, lorsque la France exsangue mais volontaire a su se réinventer. Ce plan, confié à Jean Monnet, n’était pas un simple document administratif : il traduisait une ambition politique, économique et sociale cohérente, pensée à l’échelle d’une génération. C’est cette logique que nous devons ressusciter aujourd’hui, en lançant un grand plan de transformation à trente ans.
Ce plan devra articuler nos priorités industrielles – qu’il s’agisse de souveraineté technologique, de transition écologique ou de sécurité énergétique – avec une stratégie d’investissement dans les biens immatériels : éducation, recherche, culture, innovation. Il devra aussi redonner sens et valeur au travail. Cela implique une revalorisation significative des salaires nets réels des travailleurs aujourd’hui précarisés mais essentiels – soignants, enseignants, aides à domicile, ouvriers qualifiés – et de ceux des classes moyennes qui font vivre la République au quotidien.
Retrouver un leadership en Europe suppose enfin que la France montre l’exemple : par la qualité de ses services publics, la vigueur de sa démocratie, la cohérence de sa politique étrangère. Être leader, ce n’est pas dominer, c’est inspirer. Cela ne se décrète pas. Cela se construit, pas à pas, sur des fondations solides.
La France a déjà su, dans son histoire, faire de ses crises des leviers de refondation. L’heure est venue de renouer avec cette capacité. Le temps n’est plus aux demi-mesures ni aux ajustements à courte vue. C’est d’un cap dont nous avons besoin. D’un projet national assumé, ouvert sur le monde mais fondé sur l’intérêt général et la souveraineté retrouvée. Ce sursaut est à notre portée, si nous savons à nouveau penser le long terme, parler vrai, et agir avec courage.
Jacques Carles