La vente de l’Alaska par l’Empire russe aux États-Unis

En 1867, l’achat des territoires nord-américains de la Russie par les États-Unis est une très bonne affaire.


Signature du traité de cession de l’Alaska, 30 mars 1867
(tableau par Emanuel Leutze)

Avant l'arrivée des Européens, l'Alaska était peuplé par des peuples autochtones tels que les Aléoutes, les Inuits (notamment Iñupiat et Yupiks) et d'autres Amérindiens.
En 1732, l’explorateur Ivan Fedorov est le premier européen à « découvrir » la côte nord de l’Alaska. Quelques années plus tard, en 1741, Vitus Béring un marin danois au service de la Russie et Alekseï Tchirikov, issu de l'Académie navale de Saint-Pétersbourg, poursuivent l’exploration des côtes de l’Alaska, cette fois au sud. Il faut cependant attendre 1784 pour que Grigori Chelikhov, un navigateur et commerçant, créée la première colonie russe en 1784 dans le but de chasser les loutres de mer et de vendre leur fourrure. Avec la fondation en 1799 de la Compagnie russe d'Amérique par Nikolaï Rezanov , des comptoirs et des forts s’établissent sur les îles Aléoutiennes et le long de la côte américaine du Pacifique, depuis le nord-ouest de l'Alaska (déclaré russe en 1808) jusqu'au nord de la Californie.

La Russie d'Amérique sur le continent américain au XIXe siècle avec ses territoires de chasse.
(Keeby101, CC BY-SA 3.0)

 Le commerce des fourrures, très lucratif à ses débuts, provoque rapidement la presque disparition des loutres de mer obligeant les trappeurs russes à pénétrer davantage dans l’intérieur de l’Alaska pour trouver d’autres sources de revenus, notamment le bois des forêts. Toutefois l’intérêt économique de ce territoire semble négligeable aux yeux du tsar Alexandre II alors en difficulté financière. Considérant que la Russie à mieux à faire en concentrant ses ressources sur la Sibérie et l’Extrême-Orient, notamment dans les régions bordant le fleuve Amour, il charge le baron Édouard de Stoeckl de négocier la vente de la "Russie d'Amérique".

Édouard de Stoeckl
(photo de Mathew Benjamin Brady)

Nommé chargé d'affaires de l'ambassade de Russie à Washington en1850, Stoeckl, avait épousé une Américaine, miss Elisa Howard. Devenu ministre résident en 1854, il avait noué des relations avec de nombreux dirigeants et politiciens américains. En 1858, il approche en secret le sénateur de Californie William M. Gwin pour lui présenter cette possibilité pour les États-Unis d’étendre leur territoire vers le nord. La guerre de Sécession qui se déclenche en 1861 ne permet pas d’aller plus loin mais elle va néanmoins avoir un impact positif sur le projet. En effet alors que la France de Napoléon III et l’Angleterre victorienne soutiennent ouvertement les Sudistes, la Russie prend fait et cause pour l'Union et le gouvernement d'Abraham Lincoln. Elle ne se contente pas d’un simple soutien diplomatique. Elle envoie ses navires de guerre dans les ports des villes cruciales de l’Union pour prévenir les attaques des Sudistes.
Quand les discussions pour la vente de l’Alaska reprennent en 1867, elle bénéficient du climat d’amitié qui s’est instauré entre la Russie et les États-Unis. Les négociations sont rondement menées le 30 mars avec avec cette fois le secrétaire d'État William Seward, dont Édouard de Stoeckl était un proche. Elles aboutissent à 4 heures du matin par la signature d’un traité fixant le prix d'acquisition de l’Alaska à 7 200 000 dollars, soit l’équivalent de120 millions de dollars d’aujourd’hui, un prix bien modeste en regard d’un territoire grand comme presque 3 fois la France.

Le Sénat des États-Unis ratifie le traité le 9 avril 1867, par un vote de 37 voix pour et 2 contre. Cependant, le versement des fonds n’est effectif qu'un an après à cause de l'opposition de la Chambre des représentants, qui ne voit pas l’intérêt de cet achat, comme d'ailleurs beaucoup d’Américains à l’époque. La Chambre des représentants finit néanmoins par approuver le traité en juillet 1868, par un vote de 113 voix pour et 48 contre.

Le territoire de l'Alaska deviendra le 49ème état des États-Unis en 1959. Sa population actuelle est d'environ 750.000 habitants.

Tu ignores qui est ton ami et qui est ton ennemi jusqu'à ce que la glace sous tes pieds se brise

Proverbe inuit


L’opposition des autochtones à la colonisation de l'Alaska

Les peuples autochtones, qui occupaient l’Alaska depuis environ 11000 ans, se sont longtemps opposés à la colonisation de leur territoire par les Russes. Ils luttaient en particulier contre la Compagnie russe d'Amérique qui multipliaient en Alaska des comptoirs de traite de la fourrure. Ils voyaient cette expansion comme une menace pour leur territoire et leurs moyens de subsistance.
La bataille de Sitka, survenue en 1804, est un des évènements marquant de ce conflit. Cette bataille opposa, sur l'île Baranof, les forces russes de la marine impériale dirigées par Alexander Baranov aux autochtones Tlingits.

La bataille de Sitka par Louis S. Glanzman

La bataille fut marquée par des violents affrontements, notamment des combats terrestres et navals. Malgré la résistance farouche des Tlingits, les forces russes ont finalement réussi à s'imposer et à établir un fort, consolidant ainsi leur présence dans la région.

La bataille de Sitka eut des conséquences durables, marquant le début de la domination russe en l'Alaska, laissant des traces durables tant sur le plan politique que culturel.

Les traces visibles du passé russe : ici la ville d'Unalaska et son église orthodoxe.

Sur le plan humain la colonisation russe puis américaine fut catastrophique pour les autochtones : on estime à 90% la baisse de la population indigène entre 1800 et 1885.  Vodka, whisky et maladies infectieuses importées ont eu en Alaska les mêmes effets qu'ailleurs.



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